Tom Waits / Real Gone
Tom Waits
Real Gone
Dissipons d'emblée un fâcheux malentendu. Ce disque aurait du figurer
dans la sélection de l'année. Je l'ai écarté faute de temps, d'écoute
superficielle car ce n'est pas surtout pas un disque facile d'abord. Ca
écorche, ça gratte sous les bras, ça se mérite, un tel disque.
« Real Gone » est placé sous le signe du blues. Un blues
primitif, guttural ou se détache de prime abord les borborygmes du chef
et la guitare toujours aussi complice et magique de Marc Ribot qui
signe ici son grand retour dans le bazar de l'oncle Tom. Pas de clavier
ni de piano, ce qui confère à l'ensemble cet aspect un peu rude. Tom
Waits réussit la synthèse entre le dépouillement du chant des bluesmen
des années 30 et la rudesse des chants primitifs des esclaves
(« Hoist that rag » « Don't go into that barn »).
Une sorte de croisement entre les blues de « Blue Valentine »
et les expérimentations de « Swordfishtrombones ». Un
condensé de ce qu'il a su offrir de mieux aux différentes étapes de sa
déjà longue carrière. Seul, le dylanien « Day After
Tomorrow », consacré aux pensées en direction de sa belle d'un
jeune soldat américain en Irak déçoit un peu. Trop long, trop convenu
aussi peut-être. Mais partout ailleurs, Tom Waits, qui s'y connaît
toujours dans l'art de trousser une chanson en quelques mots bien
sentis (« How it's gonna end »), de poser un climat,
impressionne dans ce disque bancal mais vibrant.